Impressions de cinéma japonais
– Gravures et dessins

Jean-Marc Forax a été marqué par les reproductions miniatures des affiches sur les jaquettes des VHS par lesquelles il a découvert de nombreux films japonais.
(…) Par l’aquarelle, sur un papier destiné à la calligraphie, Jean-Marc Forax fait pièce unique de ces objets multipliés par l’impression standardisée ; le glacis et la transparence, les flous de l’aquarelle, le grain léger du support se substituent au papier glacé, évoquant l’émotion d’un souvenir par un procédé cette fois non mécanique.

Dans la série d’aquarelles, l’artiste travaille toujours le rapport du cinéma au souvenir, mais d’une autre manière que dans la série de gravures.

À partir d’affiches de films marquantes, il dessine des affiches de films sortis non en salle, mais de son imagination.

Jean-Marc Forax

La vibration de l’aquarelle et les dimensions des pièces de la série renversent en effet la place ordinaire des affiches ; l’affiche, destinée à l’origine à l’espace public et publicitaire, devient ici expression de l’intime.
Les impressions des films se fondent dans le cours de nos vies ; à l’inverse, l’artiste dissémine dans les dessins de cette série de films rêvés de menus clins d’œil autobiographiques, des portraits familiers, rappelant par là que la vie et les films s’entrelacent dans la mémoire.

GRAVURES

 

Pour qualifier ce travail de gravure, on pourrait alors parler d’adaptation, comme on le dit des œuvres cinématographiques qui s’abreuvent à la source d’une œuvre littéraire, les unes et les autres « s’éclairant réciproquement » ; c’est ici une adaptation du médium cinéma vers le médium gravure. Comme toute adaptation, il s’agit d’une lecture, d’une interprétation.

Jean-Marc Forax

 Les gravures sont le résultat de choix successifs dans le matériau du souvenir : le choix d’un film parmi les souvenirs d’un spectateur, puis, au sein d’un plan retenu, un arrêt sur image qui fige le mouvement à un instant t. Si l’on choisit d’appuyer sur pause quelques secondes plus tard, l’impression laissée par une séquence, voire son sens, peuvent changer considérablement. À ces premières substitutions – le photogramme pour le film, le fixe pour le mouvant, le pur visuel pour l’audiovisuel – s’ajoutent les choix de composition, car graver, c’est creuser des traits, des lignes, des vides dans l’image, c’est souligner telle forme plutôt que telle autre, actualiser seulement certaines formes dans les virtualités de l’image source, dans la matrice de l’image première. La mise sous presse est une nouvelle occasion de porter un autre regard sur l’image, comme dans le tirage photographique. Sans retouche postérieure à l’impression, les gravures sont plus ou moins gaufrées, laissant plus ou moins passer le grain du papier, pour des effets variables. Le film en noir et blanc peut donner lieu à une gravure bichrome en rouge et bleu.

Rapprocher ensuite en série les monochromes ou bichromes obtenus esquisse un nouveau film, rappelant le cinéma muet – d’autant plus que l’artiste privilégie souvent la mise en valeur du geste, et des postures dramatiques.

Anastasia Rostan